Chroniques
Le bonheur m’emmerde..
C’est comme une embrassade dégoulinante qui s’échoue contre votre joue .
Un truc hypocrite qui se matérialise contre votre gré et qui se détourne, s’en va comme il est venu .
Reste cette moiteur incolore qui vous colle les pores entre eux, serrés à l’étouffée . Un carcan invisible qui vous chemine le dard jusqu’à la lie.
J’en veux pas du bonheur, ce jeu crispant qui vous oblige à sortir de vous-même le temps d’un instant .
Laissez-moi ..
J’invente mes mots, je peaufine ma partition secrète, mon antre où rien n’est le bienvenu et surtout pas le bonheur .
Qu’avez-vous tous à courir après lui?
Il est infidèle , impossible à saisir, s’émerveille de tout mais ne vous laisse rien d’autre que de vagues souvenirs, une saveur âpre échouée sur vos papilles . L’indicible instant T, farouche, scrutateur et pourfendeur. Je vous vois vous débattre au front de ses lueurs, ses étincelles qui vous animent encore alors que la pénombre m’ est bien plus reposante .
Je déambule brandissant ma conscience comme une lampe de poche . J’aveugle le bonheur avec mes gros sabots, ma détermination et mes certitudes .
À de nombreuses reprises, la bave s’est évaporée, les lames effilées se sont retirées de mon corps. Encore une tentative avortée du bonheur .
Vous me pensez malheureuse?
Certainement pas .
Je ne cherche pas le bonheur , je recherche un endroit où je peux tous vous regarder sans être vue … vous voir vous agiter aurait presque la saveur du bonheur….
Thelma 21/01/2022
À toi la petite fille..
À toi la petite fille que j’ai bien connue... je me souviens de toi comme d’ une enfant timorée dont les blessures et les injustices dont tu fus la cible ont altéré à tout jamais celle que tu devais devenir. Tu avais 6 ans et tu avais déjà cessé d’être un enfant. Tu ressentais tout, tu marchais sur des œufs en attendant le prochain coup du sort . D’instinct, tu savais qu’il ne tarderait jamais . Alors à quoi bon rester en permanence dans ce monde incertain? Tu passais des heures à inventer des histoires dans ta tête et tu t’endormais avec .. l’imagination pour seul doudou ... c’est tout ce qu’il te restait ... sans doute les prémices de ton écriture une fois devenue adulte. Tu en rêvais et moi j’avais oublié. Je m’en suis souvenu à la publication de mon premier bouquin, je ne te l’ai pourtant pas dédié. Tu as été oubliée une fois de plus. Car toi et moi nous n’existons pas vraiment ailleurs que sur des photos ou dans nos histoires.
Impermanence
Ce soir la peur me tenaille au ventre comme un étau ..je rentre d’une soirée un peu arrosée pour oublier cette impermanence qui nous pourchasse tous dans chacun des retranchements de la vie …
Sur les Wc de la salle de bain, je regarde mes habits pendus, flétris d’avance au porte-manteau …J’imagine leur finitude post-mortem, leur inconvenance d’être positionnés là quand je ne se serai plus …
ils pendouillent pendant que je m’échine à trouver une raison à ça !
Ils me survivront.
Je le sais .
Je prends leur arrogance en pleine gueule . Quelqu’un prendra sa peine en main, un jour, pour les jeter aux petits riens . Tout aura disparu … Mes bijoux, mes objets préférés et qui sait, même mes livres finiront sur l’étal d’une brocante pour continuer d’exister dans des mains qui ne m’auront jamais connue.
On passe notre vie à consommer, à croire que la colère du minime nous porte, nous rend grand et indispensable dans chaque portion du vivant … La famille, les enfants, le boulot et la baraque .
Mais qui sommes-nous au fond ?
Au fond du trou, on crève et en attendant on continue à se la jouer « belle belle »...
L’importance que nous nous offrons est comme ce bouquet de fleurs qui nous ornent et qui se meurent au bout 8 jours maximum.. Pourquoi les acheter ? Parce qu’on y croit, on vit d’espoirs insensés.. On décore, on embellit nos futurs tombeaux sans avoir l’once d’une pensée lorsque ce qui nous anime périra .. du jour au lendemain..
Thelma